Inclassable, quelque part insaisissable, parfaitement insituable et c’est tant mieux. Né en 1969 dans le 94 – comme il le dit lui-même –, Éric Arlix vit à Alfortville, justement dans le 94. Un écrivain, un artiste, un chercheur de formes dont les livres et la production hétérogène sont impactés et agencés par des tendances et des sujets récurrents comme les fictions en tant que scénarios de vie (propagande, storytelling, soft power) ou comme l’histoire du capitalisme et de ses récits abracadabrantesques. De 2005 à 2015, il crée et dirige les éditions è®e où il publiera 57 livres, 3 DVD et 2 CD audio dont la revue de littérature TINA (9 numéros). De 2007 à 2009, il dirige une collection de littérature aux éditions IMHO, la collection « Et hop » où il publiera 10 livres. Début 2017, il porte sur scène le projet musical « Golden Hello le Rendez-Vous » avec les musiciens Serge Teyssot-Gay et Christian Vialard. Avec ces deux musiciens, il crée en mai 2018 le groupe Hypogé. Seul ou à travers de multiples collaborations (auteurs, artistes, musiciens), il mène son expérimentation artistique, sa recherche, en tirant des fils entre le réel improbable et le futur chaotique.
Éric Cherrière est-il un écrivain devenu cinéaste ou un cinéaste devenu écrivain ? Les deux, mon capitaine. Metteur en scène, scénariste et écrivain donc. Tout à la fois féru de littérature et de cinéma. De préférence de genre. À la fin des années 1990, il se fait la main sur une poignée de courts métrages. En 2003, il coréalise avec Claude Ledu Aragon, terre de western qui rend hommage à une poignée de producteurs barcelonais qui prirent le risque de fabriquer leurs propres westerns loin de Hollywood. En 2007, le duo remet le couvert avec Rouge western, un documentaire où le western italien est vu sous un angle délibérément contestataire. Pourtant, trois ans plus tard, il prend son monde à contre-pied en publiant un premier roman, Je ne vous aime pas, tout aussi violent que mélancolique. Dans la foulée, son deuxième livre, Mademoiselle Chance (2013), continue d’explorer « cette rage sourde qui accompagne les hommes ». Dès lors, Cruel (2014), son premier long métrage, constitue une forme d’aboutissement en livrant le portrait d’un tueur en série à la dérive. Les héros sont fatigués, la société divise les hommes et les regards des enfants n’y pourront rien. Et si L’Inconnu (2019), son troisième roman, revisite la lutte des classes à travers une série de crimes qui visent les plus grandes familles françaises, c’est peut-être Ni dieux ni maîtres, un film d’aventure médiéval atypique, qui synthétise le mieux ses préoccupations. L’héroïsme, l’innocence, le mal et un amour inconditionnel pour les mots. Son dernier livre, Mon cœur restera de glace, vient de paraître aux éditions Belfond.
Un journaliste, producteur, scénariste, éditeur de bandes dessinées et animateur de télévision. Jean-Pierre Dionnet au nord, au sud, à l’est et à l’ouest. Il débute en écrivant des articles sur les comic books made in USA à une époque où ceux-ci sont quasi unanimement détestés par la critique de bandes dessinées. À la fin des années 1960, il est brocanteur le week-end, puis commis en librairie lorsque se crée la librairie Futuropolis. À partir de là tout s’accélère : il entre au journal Pilote et écrit des scénarii pour Druillet, Bilal, Solé, Got, Mœbius et les autres. Après un crochet à L’Écho des Savanes où il occupe le poste de rédacteur en chef adjoint, il fonde, en 1975, avec Mœbius, Druillet et Bernard Farkas la revue Métal Hurlant qui change définitivement le paysage de la bande dessinée en France. Jamais fatigué, ni éreinté, le Dionnet ne dort jamais. En 1980, à la demande de Pierre Lescure (fervent lecteur de Métal Hurlant), il co-crée Les Enfants du rock à l’intérieur desquels il produira l’improbable émission « Sex Machine ». Neuf ans plus tard, il lance sur Canal + son légendaire « Cinéma de Quartier » qui, durant deux décennies, remet en lumière les petits et grands maîtres du cinéma populaire des années 1960 et 1970. Comme si ça ne suffisait pas, il se lance, via la société Des Films, dans la distribution de films asiatiques et fait connaître au public Johnnie To, Tsui Hark, Hayao Myazaki, Takashi Miike ou encore Takeshi Kitano. Ce n’est pas une mais bel et bien deux ou trois générations qui seront influencées par cet infatigable passeur de cultures.
Bien connue des cinéphiles belges depuis une vingtaine d’années pour ses présentations au BIFFF (Brussels International Fantastic Film Festival), à la Cinematek (Cinémathèque royale de Belgique), au Razor Reel et bien sûr au festival Off Screen de Bruxelles au sein duquel Vanessa Morgan participe activement à la programmation depuis 2017. On lui doit notamment une impeccable rétrospective sur la cinéaste Roberta Findlay ou encore « Death on Film » : une solide sélection qui, de Mondo Cane à Henry, portrait d’un serial killer en passant par Nekromantik, explore la fascination de la mort sur grand écran. Parallèlement à ses activités de programmatrice, la stakhanoviste belge dirige et édite les guides cinématographiques When Animals Attack: The 70 Best Horror Movies with Killer Animals et Strange Blood: 71 Essays on Offbeat and Underrated Vampire Movies. Si le premier perquisitionne le sous-genre des attaques animales, le second, lui, déterre d’obscurs films de vampires en provenance de vingt-trois pays différents. Des griffes et des crocs encore et toujours lorsqu’elle écrit Avalon, un livre sur son chat qui finira par devenir un court métrage où le fidèle félidé jouera son propre rôle. L’histoire pourrait s’arrêter là mais Vanessa Morgan est aussi l’auteure des thrillers fantastiques Drowned Sorrow, The Strangers Outside, A Good Man et Clowders. À noter que trois de ses récits seront adaptés pour le cinéma. Elle travaille actuellement à la finition d’Evil Kids, un recueil sur les enfants maléfiques dans le cinéma d’horreur.
Né en 1971 à Toulouse, Manuel Pomar y vit et y travaille encore de nos jours ; c’est peut-être cela qui fait de lui un collapsologue éclairé. Bercé de bandes dessinées, de romans de science-fiction et de films de genre, il entame des études « chaotiques » aux Beaux-Arts tout en vivant son fantasme ultime de rock star au sein des No Pasaran. Un groupe qui, comme bien d’autres, sera traumatisé par la sortie de Nevermind de Nirvana. Aujourd’hui, Manuel Pomar est artiste, commissaire d’exposition, auteur et directeur artistique de Lieu-Commun. Activiste de la scène des artist run spaces en France, il soutient avec conviction des artistes atypiques qui s’épanouissent dans les périphéries de l’art. Il écrit pour des revues et de nombreux catalogues d’artistes, comme ceux de Jean Denant, Nicolas Daubanes, Mademoiselle Kat, Camille Lavaud… En tant qu’artiste, il a développé une pratique à la fois personnelle et commune au sein du collectif ALP de 1999 à 2006. Il pratique une peinture décomplexée et fait se télescoper high et low culture dans un maelström jouissif qui pratique un grand écart entre références pointues et dilettantisme revendiqué. Ses projets curatoriaux abordent les notions d’économie, d’écologie et de survie, d’errance et de bricologie, ses expositions sont des paysages mentaux à parcourir en toute liberté. Il affectionne les arts populaires et participe à effacer les frontières entre les styles ; dans ses commissariats il fait cohabiter bande dessinée, graffiti et art contemporain.
Directrice artistique, éditrice, graphiste, performeuse, modèle… La Toulousaine Marie Savage Slit a plus d’une corde à son arc et c’est tant mieux. En 2017, elle crée la revue Berlingot qui s’offre comme un condensé artistique explorant les facettes érotiques de nos corps, de nos désirs et nos genres. Marie débusque les artistes à l’international. Elle pioche, sélectionne, assemble, compile et met en lumière mais surtout en valeur. Le ton est résolument rock’n’roll et l’objet toujours léché. Dans Berlingot, on trouve de la photographie, de l’illustration, de la sculpture, de la broderie, de la poésie, de la prose BDSM et beaucoup d’autres choses humides, glissantes et belles. Pour elle, ce mook se veut « un support inclusif pour nos intimités, le reflet d’une fluidité organique sensible et excitée ». L’art envisagé comme pulsion sexuelle. La publication l’emmène bien vite aux quatre coins de l’hexagone où s’organisent des soirées qui mêlent performances, workshops, conférences, débats et concerts. Marie Savage Slit au gré de ses désirs.
Un cas unique dans l’arène du cinéma de genre. Un drôle d’oiseau dont les pérégrinations l’ont mené un peu partout autour du globe. Sud-Africain d’origine, Richard Stanley est le descendant du célèbre journaliste-explorateur Sir Henry Morton Stanley. Sa mère est une artiste-anthropologue connue pour son livre Mythes et légendes d’Afrique du Sud. S’il étudie l’anthropologie, ce n’est que pour mieux filmer rituels initiatiques et danses tribales. La magie entre dans son monde et ne le quittera plus jamais. Mais c’est pourtant à Londres, à la fin des années 1980, qu’il réalise une poignée de clips vidéo pour Renegade Soundwave, Public Image Limited ou encore Fields of Nephilim. Auréolé du succès de Hardware (1990), son premier long métrage cyber punk, il retourne en Afrique du Sud où il filme dans le désert de Namibie l’étrange Dust Devil (1992), qui se veut à la fois western, thriller et film d’horreur. Mysticisme, fantastique et croyance en des anciens dieux. Un sacré cocktail qui détonne au sein d’une série de documentaires, notamment The Secret Glory (2001) sur le nazi Otto Rhan qui s’était mis en tête de retrouver le Saint Graal en pays cathare juste avant la Seconde Guerre mondiale. Entre-temps, le cinéaste globe-trotteur se sera fait évincer du tournage du remake de L’Île du docteur Moreau, aura réalisé un segment de l’anthologie The Theatre Bizarre et participé entre autres à l’écriture de l’adaptation de High-Rise que devait réaliser Vincenzo Natali. Il est aujourd’hui à nouveau sur le devant de la scène grâce à son adaptation de La Couleur tombée du ciel de H.P. Lovecraft.