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Elia Suleiman

Du vendredi 09 mars 2018
au samedi 10 mars 2018


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Auteur d’une politique

On se souvient de cette scène de gunfight hallucinante, entre scène de jeu d’arcade et scène de série japonaise des années 1980, où une combattante palestinienne lévitait, une couronne de balles autour de la tête, dans un étrange croisement d’iconographie christique et de posture ninja. Un OVNI qui était reparti du Festival de Cannes 2002 avec le Prix du jury. Yasser Arafat, dessiné sur un ballon de baudruche rouge, y traversait également un checkpoint israélien dans une forme de poésie de combat. Il s’agissait d’_Intervention divine_, le deuxième long métrage d’Elia Suleiman, et l’on découvrait un nouveau cinéaste qui semblait sorti de nulle part – et pour cause, Suleiman est du peuple des exilés, ayant quitté un pays qui n’existait pas quand il n’avait pas vingt ans. On redécouvrait aussi la Palestine au cinéma, une nation réduite à une imagerie de JT et qui s’exposait là dans une cinématographie inédite. C’est qu’Elia Suleiman a développé, en seulement trois longs métrages, une manière bien à lui de raconter ses histoires – la sienne et celle de la Palestine. Une manière poétique et décalée, toujours inattendue, brassant l’humour et la dérision. Une manière qui s’est affranchie des codes classiques du récit. Une manière d’une liberté totale qui tranche avec l’idée d’enfermement inhérente à un pays – un territoire, une société, une culture – occupé. « Le récit linéaire, dira-t-il dans un entretien aux Cahiers du cinéma à propos de son écriture, impose au scénariste un travail très proche de celui d’un policier, car il est forcé d’enquêter en détails sur les faits et gestes de ses personnages, qui deviennent des suspects dont il faut établir l’emploi du temps, à force de questions pointilleuses. D’où vient-il ? Pourquoi était-il là ? Pourquoi a-t-il ouvert la porte ? Écrire un scénario classique relève de la conduite d’un interrogatoire, ce qui, pour moi, n’a rien à voir avec la fonction de cinéaste. Ce point de vue d’autorité est une démarche que je refuse absolument, qui m’ennuie, me place dans une position intenable. Comment justifier la perte d’un élément du film, un meurtre, un accident grave, comment décider de la mort d’un personnage ? Cela ressemble à un acte monstrueux. C’est pourquoi je préfère jouer sur un registre différent et favoriser les ellipses, les rencontres fortuites, les trajectoires inexpliquées. » Est-ce là la seule manière pour le cinéma de faire corps avec une histoire complexe ? Probablement. Une des plus justes en tout cas. Qui fait corps. Et âme. Où le récit – la manière de le mener, sa forme – se fait politique. Dans le refus du diktat du scénario classique « policier » ; où la forme, elliptique, fulgurante et répétitive, se fait métaphore d’une identité palestinienne résistant à l’effacement (voir Chronique d’une disparition). Dans l’histoire personnelle et familiale, autobiographique, qui nourrit ce récit – Le Temps qu’il reste bien sûr, mais les deux autres pareillement. Dans cet alter ego de cinéma, enfin, qu’Elia Suleiman s’est inventé, sorte de Nanni Moretti keatonien à la fois moteur et observateur de l’action. L’ensemble ouvrant sur un cinéma qui donne à se réapproprier une géographie en jouant avec les nuances de durée. Dilatant le temps pour diluer les frontières. Pour une poésie du politique.

Franck Lubet, Responsable de la programmation

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Ciné-Palestine fêtera ses quatre ans en 2018, à Toulouse et en région, et sera présidé par Guy Chapouillié.
La 4e édition renouvelle son partenariat avec la Cinémathèque de Toulouse où seront présentées les œuvres du grand réalisateur Elia Suleiman : Chronique d’une disparition, Intervention divine et Le Temps qu’il reste.
De nombreux réalisateurs et réalisatrices sont au programme avec Ave Maria de Basil Khalil et Ghost Hunting de Raed Andoni, Ours d’or au festival de Berlin en 2016.
Courts et longs métrages, fictions et documentaires, plusieurs inédits à Toulouse, seront projetés à l’ABC, au Cratère, à l’American Cosmograph, à l’ENSAV et en région : Albi, Bressols, Carmaux, Figeac…
Rencontres, discussions, exposition photo, lecture et musique enrichiront l’événement.
Ciné-Palestine existe aussi hors-saison avec des séances plusieurs fois par an.

Tous les renseignements sur cinepalestine.free.fr et sur la page Facebook Ciné-Palestine Toulouse