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Festival Extrême Cinéma 2020

Du vendredi 07 février 2020
au samedi 15 février 2020


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Roaring 20’s

L’an dernier à cette même époque, à travers ces mêmes lignes, nous constations combien le cinéma de genre, le cinéma d’exploitation, ou le cinéma bis, quel que soit le nom qu’on veuille lui donner, avait gagné ses lettres de noblesse. Longtemps considéré avec dédain comme objet de sous-culture, on peut en effet dire qu’il est désormais fréquentable. Tendance confirmée ces derniers mois : rétro de trois films de naziploitation au Fifigrot, rétro en quatre films de Carpenter au Gaumont Wilson et, encore en quatre films, une rétro Lucio Fulci à l’American Cosmograph, pour ne parler que de Toulouse. Le bis n’est plus remisé au ban du bon goût cinématographique. Il est en passe d’avoir pignon sur rue. De quoi d’abord se réjouir de la multiplication des lieux et des temps offerts au genre. De quoi se féliciter. Extrême Cinéma travaille à l’exposition du cinéma de genre depuis vingt ans et peut s’enorgueillir d’avoir participé à la contamination des circuits commerciaux classiques. De quoi s’interroger aussi, comme il se doit toujours quand la reconnaissance arrive. Le temps de reconsidérer le cinéma bis comme objet culturel à part, mais à part entière, est révolu. Est venu désormais le temps où il est considéré comme de la culture, en rejoignant le haut du panier. Études universitaires, publications, essais… L’amateur d’hier est devenu expert. Le fanzine incomplet et enflammé a laissé la place à de la belle ouvrage exhaustive et savante. Une évolution qui marque, peut-être davantage que la multiplication des festivals qui lui sont consacrés depuis une dizaine d’années, ce changement de statut. Ajoutons à cela la création par le CNC d’un fonds d’aide spécifique à la production d’un cinéma de genre et on peut parler de consécration. Top of the world, Ma! comme dirait James Cagney dans L’Enfer est à lui. Top of the world, comme il hurlait, dévoré par les flammes. Le cinéma de genre n’est-il pas aujourd’hui ce Cagney psychopathe brûlant au sommet ? C’est la question que l’on peut se poser. Car l’enfer est toujours pavé de bonnes intentions. Pavé dans la mare : où est le bis d’aujourd’hui ? Parce que jusqu’ici on parle d’un cinéma de genre établi, celui d’un âge d’or révolu, les années 1970-1980. Un cinéma devenu classique – John Carpenter étant devenu le Howard Hawks des nouvelles générations de cinéphiles – qui fait l’objet de ressorties en salles commerciales (Carpenter, Fulci, Argento, Bava, Romero…) comme Welles ou Lang hier. Quid de la production actuelle ? Hormis quelques films d’horreur, les Blumhouse qui s’inscrivent dans la philosophie cormanienne, ou quelques films de genre passés par Sundance, hormis les gros festivals internationaux (et encore ce sont plus ou moins les mêmes films qui y circulent), le cinéma de genre actuel, sans parler d’un véritable cinéma bis, ne trouve pas d’écran, étant exploité dans un flou artistique sur un marché DTV qui a remplacé les salles de quartier d’antan. Il y a là comme un hiatus. Un manque, voire un manquement. Entre le travail de défrichement que nous avons mené jusqu’ici en tant que cinémathèque et l’histoire à venir qui doit commencer à s’écrire aujourd’hui. Un travail de défense et illustration à faire en profondeur, au-delà de l’événementiel, du bon « coup », qui règne désormais. Après avoir exhumé un passé cinéphilique refoulé et fait des petits, Extrême Cinéma doit-il muter ? On se pose la question. Et on se remet en question. En effet, devant cette nouvelle considération de ce qui était jusqu’alors du mauvais genre, difficile de revendiquer et de prôner un mauvais goût assumé pour l’inacceptable ainsi qu’une volonté de provoquer le bien-pensant culturel et moral. Ce qui a toujours été notre credo. Avec la considération du cinéma de genre, c’est une forme de normalisation qui s’installe, déplaçant le champ du choquant. Le Genou de Claire de Rohmer ou Lolita de Kubrick dérangeraient plus aujourd’hui qu’une Ilsa, louve SS. Car le mauvais genre est déjà ailleurs. Un code Hays nouveau millénaire frappe déjà à la porte, en avance sur le siècle dernier qui voyait dans ses années 1920, les fameuses Roaring 20’s, une décade décadente. Raison de plus de se remettre en question, de vouloir rester hors circuit, hors des normes. Pour ne pas perdre le goût de la subversion. Raison de plus de repousser les limites du bien-pensant au cinéma et, plus que jamais, du bien-pensant du cinéma. La décadence arrive. C’est parti. Roaring twenties. La décade de la décadence. Et les folles années sont déjà comptées. Roaring. Roaring. Roaring. Le bis est partout. Top of the world. Il est déjà nulle part. Roaring baby. Roaring. And burn.

Extrême Cinéma Team

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