Jeff Lieberman | Survivance (Just Before Dawn)
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Jeff Lieberman
Il a un faux air d’Abel Ferrara, vient également de New York. Mais la comparaison, si elle devait vraiment avoir lieu, s’arrêterait là. Jeff Lieberman fait dans le cinéma de genre, mais surtout il est drôle. C’est son principal trait de caractère et celui qui parcourt tous ses films. Qu’il donne dans le slasher (Au service de Satan), le survival (Survivance), les bestioles tueuses (La Nuit des vers géants), l’invasion extraterrestre (Meurtres en VHS) ou la prévention contre la drogue – à moins que ce ne soit contre le mouvement hippie – (Le Rayon bleu), il le fait avec humour. Sans jamais déroger au cahier des charges, il parvient toujours à donner une tournure « fun » à ses bandes horrifiques. On y meurt horriblement, mais en prenant son pied et, tant qu’à faire, le contre-pied. C’est que Lieberman travaille un art de la distanciation – un second degré qui ne perd jamais de vue le premier – qui aboutit à une forme de cinéma de la décontraction. Ne pas prendre les choses trop au sérieux, même, et surtout, quand on fait du cinéma de genre. Pourtant Jeff Lieberman vient du cinéma d’auteur ; en quelque sorte. Et tardivement avec ça. Point de Blood Feast ou de Monstres attaquent la ville, c’est la vision de Blow Up d’Antonioni, alors qu’il fait une école d’art, qui lui donne le goût du cinéma. Et avant de réaliser son premier film, le cultissime Squirm (La Nuit des vers géants), pour payer les couches de sa progéniture, c’est en distribuant aux États-Unis des films européens, ceux de Bergman, de Truffaut ou autre Fellini, qu’il gagnait sa vie. D’Antonioni aux vers de terre : drôle de parcours. Drôle en effet, mais pas si étonnant que cela quand on sait que le comique en question voue une véritable passion au stand-up. Un art de la dérision auquel il a d’ailleurs consacré un documentaire, But… Seriously (trente ans de stand-up aux États-Unis, ou les États-Unis sur trente ans à travers le stand-up). C’est là le véritable point d’entrée du cinéma de Jeff Lieberman, cette expression de stand-up qui fait de ses films de grosses blagues cassantes et macabres. So : But… Seriously…
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Survivance (Just Before Dawn)
S’il est un genre propice à tous les dérapages, il s’agit bien du très glissant « survival » où, au contact d’une nature hostile, l’humanité et le civisme cèdent leur place à un retour aux plus bas instincts. Le parangon du genre, Délivrance de John Boorman, allait lâcher sur les écrans une multitude de copies et de variations pour le meilleur et pour le pire. Ici, si la structure ne change guère – un groupe de citadins perdus en pleine nature et traqués par des autochtones –, la proposition est tout autre. À l’excès de gore, Jeff Lieberman préfère une tension de tous les instants tapie derrière chaque arbre. À l’excès de misogynie inhérent au genre, le réalisateur répond par une salve de personnages féminins enfin aptes à se défendre et à survivre. Mais le cinéaste new-yorkais capte surtout l’affaissement du jour, un lent processus où la beauté d’une forêt se mue peu à peu en un cauchemar organique. Just Before Dawn : une réussite du genre, on vous le dit.