Dandies hollywoodiens | Ni dieux ni démons (Gods and Monsters)
Bill Condon. 1998. Grande-Bretagne / États-Unis. 106 min. Couleurs. 35 mm. VOSTF
Dandies hollywoodiens
Le 29 mai 1957, James Whale, le père de Frankenstein, était retrouvé mort dans sa piscine vide. Atteint d’une maladie grave, Whale ne supportait plus de se voir décrépir, de sentir la vieillesse dévorer son corps. En 1998, Bill Condon, le père de Candyman, donnait sa version des derniers jours de la vie du metteur en scène en adaptant le remarquable roman de Christopher Bram. Ni dieux ni démons n’a rien du biopic sentencieux et appliqué, et c’est avec subtilité et tendresse qu’il évoque un destin hors du commun tout en observant les affres et la beauté du processus de création. Ou plutôt l’incapacité de créer quand votre corps vous lâche. Histoire d’amour entre deux hommes que tout sépare – Whale et son jardinier –, œuvre touchante sur l’inéluctabilité du temps qui passe, poignant ouvrage sur la conscience de sa fin, le film de Condon force le respect quand il brandit un magnifique passage de témoin. Tout père engendre un fils qu’il soit fait de chair, de papier, de celluloïd ou simplement spirituel. Cette filiation se retrouve très clairement dans les débuts de carrière expérimentaux de Curtis Harrington. Conseiller technique sur Ni dieux ni démons, Harrington côtoya Whale du temps de sa grandeur et en tira logiquement un long chapelet d’influences. Preuve est donnée avec une brochette de courts métrages compris entre 1940 et 2002 où, avant de s’envoler pour une carrière hollywoodienne, l’expérimentateur Harrington partage avec Whale ce même goût pour l’humour noir décalé et le conte macabre.