Rencontre avec Frank Henenlotter
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Son inspiration, il l’a trouvée en arpentant le pavé et les salles de la 42e Rue. Dans les années 1970 et 1980, l’enclave new-yorkaise diffuse 24 heures sur 24 des films, la plupart d’exploitation. Le meilleur y côtoie le pire mais, sur l’écran, il est souvent question de sexe, de drogue, de nudité et d’horreur. Quelque part, les quatre points cardinaux qui constituent les fondements d’une œuvre farouchement indépendante et radicalement incorrecte. Bien plus que de simples comédies horrifiques, les films de Frank Henenlotter ont énormément de choses à dire. Lui vous dira certainement le contraire. De Basket Case (1982) à Frankenhooker (1990), d’Elmer le remue-méninges (1987) à Sex Addict (2008), le cinéaste s’emploie à mettre en lumière cette Amérique que l’on ne voit jamais, ce quart-monde insensé peuplé de paumés, de freaks et de laissés-pour-compte. En tant que directeur de collection pour le label Something Weird, il exhume les perles noires d’un cinéma proscrit. En tant que cinéaste, il orchestre une légendaire explosion de prostituées dans une chambre d’hôtel, se prend d’affection pour la femme aux sept clitoris et met face à face un jeune drogué et sa seringue, en fait un étron phallique pourvu d’une double rangée de dents acérées. En marge du système, droit dans ses bottes, Frank Henenlotter fait du cinéma debout. Et pour nous, ça veut dire beaucoup.