Le Mur
Serge Roullet. 1967. Fr. 90 min. N&b. DCP.
Les collections à la une
L’intrigue de la courte nouvelle de Sartre adaptée par Serge Roullet est simple : trois hommes passent leur dernière nuit dans une cellule avant d’être fusillés. L’essentiel du film se situe dans la tension émotionnelle au cours de cette attente insoutenable durant laquelle le temps s’appesantit.
Réalisé à l’âge de 40 ans, Le Mur est le premier long métrage de fiction de Serge Roullet, qui avait été l’assistant de Robert Bresson sur Procès de Jeanne d’Arc. Sa méthode d’écriture et de travail a bien des points en commun avec celle de Bresson : comédiens non professionnels, plans fixes, sens du détail, des silences, des regards.
Le film est sélectionné à la Mostra de Venise, où Serge Roullet le présente accompagné par Jean-Paul Sartre, pourtant peu friand de festivals et de mondanités. L’écrivain adhère à l’adaptation de façon inconditionnelle : « Je considère son adaptation comme scrupuleusement fidèle, comme originale en même temps qu’honnête » déclare-t-il lors de la conférence de presse. Cet accord, il l’avait déjà écrit au réalisateur : « Dans ce film austère et rigoureux, les images, les temps, les gestes ont rendu poignante et presque intolérable l’angoisse de ces condamnés à mort. Cette angoisse, je la disais mais vous nous la faites subir ».
Serge Roullet a confié à la Cinémathèque en 2020 les éléments numériques de ses films, ainsi que quelques éléments sur pellicule. Il a également donné une grande quantité de photographies et d’archives concernant l’écriture et la réalisation de ses films. Ayant découvert la Cinémathèque par sa programmation, c’est un juste retour de présenter son premier film, porte d’entrée dans une carrière cinématographique radicale et sans concessions.
Un rendez-vous désormais traditionnel des documentalistes du service Film avec le public de la Cinémathèque : un fonds des collections est exploré par les archivistes, puis offert au regard curieux des spectateurs.
Cette année nous avons choisi d’interroger les films qui ont été déposés à la Cinémathèque de Toulouse par leurs réalisateurs. Inquiets de l’avenir de leur œuvre, concernés par le travail de mémoire ou simplement désireux d’offrir au public leurs films, les cinéastes nous confient parfois les rares copies qu’ils possèdent. C’est une histoire de confiance et d’affinité qui se construit avec le temps, grâce aux hommages que la Cinémathèque leur dédie mais aussi grâce au bouche à oreille entre collègues : « Où sont conservés tes films ? A Toulouse ? Et comment sont les magasins ? Ceux qui y travaillent, répondent-ils au téléphone quand on les appelle, sont-ils à l’écoute ?… ». La Cinémathèque ouvre grand ses portes aux créateurs, elle est attentive à leurs besoins, elle a conscience de l’anxiété avec laquelle on confie ses « petits » aux mains d’autrui.
Les réalisateurs qui font le choix d’envoyer leurs films à Toulouse sont de genres très différents : il y a les cinéastes aimant l’expérimentation, les indépendants engagés, les adeptes du policier, les maîtres du documentaire, et ainsi de suite. Nous vous réservons bien de découvertes, laissez-vous guider dans cette balade à l’année !