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Sans toit ni loi

Agnès Varda. 1985. Fr. 106 min. Coul. DCP.


Galaxie Varda



Elle survit avec énergie malgré la faim, la soif et le froid. Elle vagabonde et installe sa tente où elle le peut, près d’un garage ou d’un cimetière. Elle erre, marche et marche encore jusqu’au bout de ses forces. Mona sera retrouvée morte de froid dans un fossé. Un simple fait divers comme tant d’autres rapidement classé par les gendarmes. Mais que peut-on savoir d’elle ? Comment ont réagi ceux qu’elle a croisés ?

Tout en flash-back, Sans toit ni loi retrace les deux derniers mois de la vie de Mona. Un portrait en creux par ceux qui l’ont côtoyée, qu’ils soient tailleur de vignes, garagiste, chercheuse spécialiste des platanes, berger ou domestique. Un périple au bout de l’indépendance. Un film rude et sans concession avec une Sandrine Bonnaire à fleur de peau, qui trouve là un de ses meilleurs rôles.

Le huitième long métrage d’Agnès Varda, et si le sujet appelle forcément le documentaire, la cinéaste, pourtant rôdée à l’exercice, le refuse, trop attendu, trop voyeuriste, trop sensationnaliste. Sans toit ni loi sera donc un film de fiction à tout petit budget, régi par le système D. À Agnès la débrouille, rien d’impossible. L’équipe technique est réduite au minimum, la garde-robe de Mona se complète dans un magasin Tati, le maire de Nîmes active ses réseaux pour faciliter le tournage, et un magasin de papier peint de la ville prête sa camionnette pour transporter du matériel. Mais derrière Agnès la débrouille se dissimule Agnès l’esthète. À propos de Cléo de 5 à 7 (1962), Agnès Varda déclarait : « Ma différence avec les cinéastes de la Nouvelle Vague, c’est que j’ai toujours été plus intéressée par la structure d’un film que par son histoire. » Vingt-trois ans plus tard, Sans toit ni loi ne déroge pas à la règle. Si Cléo de 5 à 7 se déroule dans un temps réel segmenté en treize chapitres, Sans toit ni loi, lui, s’articule en douze travellings à contresens (de la droite vers la gauche), savamment pensés. Chacun se terminant sur un élément (une grille, un pneu, une cabine téléphonique…) qui débutera le travelling suivant, situé quelque fois bien en amont dans le film.

En résumé, comme si Mona marchait de manière ininterrompue. Une mécanique de précision au service du portrait d’une rebelle qui ne va nulle part. Sans toit ni loi mais aussi sans foi ni loi. Mona n’est décidément pas un personnage sympathique, mais le rôle de Varda n’est pas de juger et encore moins de comprendre. Sans toit ni loi n’est rien d’autre que le quotidien d’une sans-abri aux chaussettes trouées, les doigts dans l’huile d’une boîte de sardines, et tout autour d’elle c’est une France rance et raciste à la crasse misogynie qui se dévoile. Un constat sans appel pour la marche funèbre d’une paumée qui finira morte de froid dans un fossé. Un fait d’hiver comme tant d’autres…

Tirez les fils de Sans toit ni loi et vous rencontrez : Wendy et Lucy, L’Épouvantail, Peaux de vaches et My Own Private Idaho.

jeudi 24 avril 2025, 19h30       Infos pratiques - Vente en ligne
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